Indésirables (2015)
- Florent Bodenez
- On March 9, 2015
Review Overview
Note
6Plaisant
Lourd sujet que celui de la condition et de la sexualité des handicapés. Indésirables est dérangeant et expose un problème peu discuté. Si la forme n’est pas la plus attrayante, la performance des acteurs et la construction narrative donne au film ses lettres de noblesse.
Jeremy Elkaïm joue Aldo, un jeune homme vivant à Paris avec sa fiancée, Lucie. Un jour ils accueillent deux nouveaux colocataires chez eux, Vanessa et Sergueï, deux aveugles frère et soeur. Ayant quelques soucis d’argent, Aldo se voit proposer par Sergueï de servir d’assistant sexuel pour des personnes handicapés, en échange d’une importante somme d’argent. Une activité qu’il va continuer à exercer chez lui, en accueillant les handicapés dans sa chambre, discrètement, pour éviter que sa petite amie ne le sache. Aldo ne leur apporte pas seulement du plaisir, il les domine, il devient l’objet du désir dont ces handicapés deviennent dépendants. Cela donne évidemment des scènes très explicites. Des passages gênants, presque tristes, mais c’est voulu, et nécessaire.
« Qu’est ce que c’est dégueulasse » clame la voix féminine d’un morceau électro lugubre qu’écoute Vanessa. Une pensée toute haute, celle du spectateur. Une mise en abîme du message du film : non ça n’est pas dégueulasse, c’est naturel et normal. Mais le fait de le rendre explicite, de ne pas le suggérer mais de le dire haut et fort engrange un ton accusateur un peu dérangeant. Comme si le spectateur devait se sentir coupable de quelque chose, coupable de ne pas les considérer, de ne pas trouver ça magnifique. Non, d’un point de vue purement cinématographique ça ne l’est pas, car la manière dont les événements sont amenés ne le permet pas. Mais le processus de l’implicite aurait pu l’appréhender d’une meilleure manière.
Le film est tourné en noir et blanc, les textes du générique sont projetés comme une simple animation Wordart, la voix off est là pour créer les ellipses temporelles ; la forme est en effet assez froide et drastique. Par manque de moyens ou par choix artistique, la justification est dure à percevoir. Mais cette esthétisme entraîne l’histoire dans une cercle vicieux, qui l’empêche de faire décoller son côté romanesque.
Oublions donc la forme. Ce qui donne la force au film, c’est la puissance des acteurs. Car les handicapés sont réels et sincères, sans artifices et donc touchants. Et s’ils le sont autant, c’est aussi parce que leurs personnages ne sont pas uniformes, chacun a ses qualités, mais aussi ses vices et sa part sombre. Entre Stéphana, douce et sentimentale, et Emmerich, cynique, en passant par l’étrange couple formé par Andréas et sa sœur mutique, le réalisateur ne dresse pas un portrait compassionnel des protagonistes, et évite ainsi de tomber dans le cliché. Béatrice de Staël et Benjamin Bouillon, les deux aveugles, sont parmi les seuls à réellement jouer un handicap, et le font à merveille. Des personnages importants qui servent à faire le lien entre Aldo (Jeremy Elkaïm, convaincant, bien qu’un peu sage) et les handicapés.
La fin du film est dans la lignée du reste, dérangeante et peu consensuelle. Elle est surprenante et prend un chemin risqué, mais qui fonctionne. Dommage que l’épilogue de la relation entre Aldo et sa fiancée n’apporte pas grand chose de plus. Indésirables ne fait pas dans la dentelle et est donc nécessaire. En tant qu’œuvre purement cinématographique, le film n’a pas un intérêt d’une grande ampleur. Mais pour son message, le problème qu’il met en avant et la performance des acteurs, son existence est importante. Et au fond, c’est sûrement son ambition. Réussi.
Synopsis
Pour pouvoir payer les études de sa fiancée, Aldo devient accompagnant sexuel pour personnes handicapées, poussé par deux amis de Lucie, non-voyants, qui lui trouvent de bonnes raisons morales de le faire. Les rencontres se suivent et ne se ressemblent pas et sa nouvelle activité, qu’il cache à Lucie, l’entraîne dans des expériences insolites et dérangeantes, dont il sortira profondément transformé.
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