Nymphomaniac – Volume 2 (2014)
Review Overview
Note
5Toujours dans le cadre de son intégrale Lars Von Trier, le festival Premiers Plans a diffusé le second volume de Nymphomaniac en avant-première. J’ai bravé la foule pour vérifier si le sentiment mitigé laissé par le premier opus allait persister, si le cinéaste danois allait retrouver ses inventions formelles et délaisser sa nouvelle veine intellectuelle trop étriquée.
Pendant 1h50, j’ai cru que Nymphomaniac c’était bien
Ce deuxième volume corrige en grande partie ce qui ne fonctionnait pas dans le premier. Moment éloquent : après que Zeligman a évoqué l’art du nœud et fait un détour par l’alpinisme, Joe répond : « C’était de loin votre digression la plus faible. » Ça y est ! Les personnages dialoguent ! Ils s’écoutent, se répondent, les divergences morales se marquent. On a enfin le sentiment d’assister à la rencontre de deux individus, et non plus à la mise en présence de deux pantins beaucoup moins drôles que Kermit et Piggy. Zeligman, surpris en même temps que nous quand Joe décide de sucer le personnage de Jean-Marc Barr, interrompt la narration ; Joe, quant à elle, commence à dénoncer les procédés trop grossiers mis en place par Trier – quand elle cherche un titre pour son dernier chapitre, elle se plaint que la décoration de Zeligman est trop pauvre, ce qui met l’accent sur le côté très artificiel du mécanisme d’associations enclenché depuis les premières minutes du volume 1. Quelle chance tout de même, chaque élément de l’appartement de l’inconnu qui a recueilli Joe par hasard a une résonance dans son histoire ! Ç’aurait presque pu être beau si Trier, partant du principe proclamé par le surréalisme que le hasard est signifiant, avait lâché la bride ici à une méthode de création arbitraire, qu’il s’était par exemple enfermé dans une authentique chambre de vieux célibataire juif pour s’y forcer à trouver des liens entre son histoire de nymphomane et ce qui s’y trouvait – malheureusement non, c’est dans l’ordre inverse qu’il a fonctionné. Et que Trier laisse entendre au bout du compte qu’il est conscient de ses erreurs ne l’excuse pas tellement. Si tu sais que tu es lourd quand tu es lourd, pourquoi ne pas être pas lourd plutôt que de dire « je sais que je suis lourd » en espérant que ça te sauve ? Peu importe, dans ce Volume 2, la brèche scénaristique est ouverte, il y a du jeu, et c’est salvateur pour esquiver in extremis la chute dans le pompeux le plus absolu.
Trier – ou du moins ses salopards de remonteurs – trouve aussi dans ce second volet un rythme plus efficace pour l’immersion dans ces mésaventures nymphomanes, un rythme plus alangui, qui gagne progressivement en intensité, et qui sait par instants ménager des surprises. Quand vient l’épisode des 40 coups de fouet, on s’attend à devoir subir la séquence en intégralité, car d’une part le rythme général semble bien se prêter à ce qu’on s’attarde là-dessus, et d’autre part que Trier ne s’est pas gêné quelques minutes plus tôt pour nous faire traverser dans toute sa durée la série de fessées précédente – eh bien non : Trier décolle promptement vers autre chose. Le projet retrouve autrement dit dans ce seconde volume un peu de l’imprévisibilité qui lui manquait cruellement. Même dans le contenu de son récit, le film finit par atteindre dans ses dernières parties un fond sadien – Joe défend les pédophiles, Joe initie très cyniquement une jeune fille à son art… – qui détonne et remue.
Pendant les 5 dernières minutes, j’ai vu que Nymphomaniac c’était n’importe quoi
Si vous n’avez pas vu le film, et que vous ne souhaitez pas être spoilés, ne cliquez pas pour voir le paragraphe suivant : j’y rentre dans le détail du dénouement. Théoriquement, je sais que ça ne se fait pas de déflorer aussi précisément la fin. Mais cette fin est une insulte, alors il me fallait la désamorcer dans le détail.
Une lueur d’espoir
Depuis que j’ai vu le film, je prie matin, midi et soir pour que ce dénouement si grossier soit affiné par le director’s cut. Sans cela, je crois bien qu’on aura affaire au plus mauvais film de Lars Von Trier.
Lire la critique de Nymphomaniac – Volume 1
Synopsis
Nymphomaniac – Volume 2 contient les trois derniers chapitres de l’autobiographie de Joe, nymphomane auto-diagnostiquée, telle qu’elle la raconte à Seligman, vieux juif célibataire qui l’a recueillie.
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