Princesse Mononoké (1997)
Review Overview
Note
10En 1997, sort au Japon, Mononoke Hime (Princesse Mononoké) et attire quinze millions de spectateurs, Miyazaki est le seul à ce jour à avoir battu Titanic sur sol nippon (avec le voyage de Chihiro). Il a rapporté plus de 160 millions de dollars, et reçu de nombreux prix. Un succès qui a permis d’attirer le feu des projecteurs du monde entier sur celui qui va devenir le grand maître du film d’animation japonais, Hayao Miyazaki et cette œuvre un point de repère pour tous le cinéma d’animation.
Hayao Miyazaki développe son œuvre autour des thèmes qui ont forgé sa légende : l’écologie, les mythes japonais, des inspirations kurosawesques et un amour immense apporté aux personnages héroïques « bigger than life ». Princesse Mononoké est un drame historique japonais traditionnel, appelé jidaigeki. Il est par définition grandiose, épique et héroïque, rempli de péripéties et de batailles majestueuses. Le film atteint l’ampleur de ses ambitions et nous transmet toute sa majesté par un choc visuel, à mi-chemin entre l’iconographie des estampes japonaises et le manga, retraçant un voyage initiatique, mais pas que…
Ce bijou contient aussi et surtout une dose non négligeable de magie et de philosophie, au service d’un sujet grave et pesant. Miyazaki raconte ici le conflit entre les esprits de la forêt et les hommes. Sujet déjà porté avec tristesse et mélancolie dans Nausicaä de la vallée du vent, première œuvre publiée entre 1982 et 1994 dans le magazine japonais Animage Monthly, puis adapté en film d’animation en 1984.
Princesse Mononoké s’axe autour d’Ashitaka, jeune prince d’une tribu, parti combattre le dieu démon maudit qui menaçait son village. Il revient touché et condamné lui aussi par cette malédiction. Pour préserver les siens il quitte sa tribu et se lance dans une quête pour comprendre les raisons de sa mort certaine, il va découvrir un monde insoupçonné. Au court de son périple il va découvrir que son mal est nourri par la colère, il devra trouver les sources en lui pour lutter contre ses sentiments et ainsi retarder l’inévitable. Ashitaka a tout quitté pour ne plus jamais revenir, il devient alors libre de ses sentiments, de son esprit, il n’a plus de responsabilités ni de contraintes et est à la recherche de la vérité. Il peut enfin voir le monde avec des yeux neufs et sans emprises. Le cinéaste place la quête et le charisme d’Ashitaka comme les éléments centraux du film.
Au sein de la forêt San a été recueillie par Moro, la Louve-Déesse et vit avec elle et ses frères-loups. De son côté humain elle a gardé un esprit d’analyse, mais sa part animale est désormais dominante. Elle communique avec les animaux et voue une haine sans nuance aux hommes et particulièrement à Dame Eboshi, dont elle souhaite la mort. San est partiale mais dévouée, forte et prête au sacrifice pour ses convictions. Sa rencontre avec Ashitaka et leurs destins liés vont la bouleverser. En dépit de l’impossibilité d’une relation, les sentiments qu’Ashitaka développe pour San sont purs. Peu importe ce qu’il se passe, il laisse son cœur parler, sans retenues, jusqu’à pleurer en présence de San. Après avoir tout abandonné, il donnera tout pour elle, et ça même Moro l’a bien compris. Leur relation les touche au plus profond de leurs cœurs et nous atteint directement par la même occasion. Cette rencontre, tout sauf banale est tout simplement hypnotique. Une union transcendée, entre réel et inconnu, qui captive le spectateur.
San et Ashitaka s’opposent et lutte contre Dame Eboshi. cheffe de village, qui combat la forêt pour offrir à l’Homme une place. Cette haine mutuelle ne pourra qu’aboutir à la destruction de la nature par l’industrialisation, et ce même si le réalisateur prend parti pour les esprits.
Le message, ancré dans le japon médiéval, est universel. Des références religieuses disséminées apportent un côté mythique à Mononoke Hime. La patte de ce génie c’est de mêler le réel et l’imaginaire, de manière « naturelle », ce qui confère aux humains une dimension touchant à la magnificence. L’autre grand personnage est le divin, le Dieu Cerf, allégorie ultime de la nature qui revêt une symbolique poétique de la vie et de la mort. Il reste cependant en dehors du conflit. La poésie inonde par la présence de la forêt et de ses petits esprits et nous plonge dans ce monde merveilleux. L’histoire touche au sublime.
Les thèmes de Princesse Mononoké sont inépuisables et se dévoilent un peu plus à chaque vision. Au travers de ce film j’ai surtout envie de vous parler d’amour. Non pas d’une romance mais de l’histoire de San et Ashitaka qui symbolise l’alliance entre l’homme et la nature, l’attraction et la répulsion, un respect mutuel sans limite, seul preuve du véritable amour. Amour encore entre San et sa mère-loup, inconditionnel, jusqu’au sacrifice, bien que contre nature. Amour désintéressé de dame Eboshi pour l’homme qui recueille des lépreux pour leur redonner une dignité, même si sa folie détruira bien des vies, ces hommes continueront à l’aimer. Et amour absolu de l’auteur pour son message. J’aime ce film, inconditionnellement, pour sa magie, les sentiments qu’il fait résonner en moi, ce message universel qu’il délivre, son intemporalité et invite à prendre conscience de notre univers, des images qui remontent à notre esprit comme des souvenirs irréels. Le tout pour établir un nouvel ordre des choses, c’est beau et triste, c’est une leçon.
Synopsis
Dans le japon médiéval, Au XVe siècle, la forêt, jadis protégée par des dieux-animaux géants, se dépeuple à cause de l’homme. Un sanglier victime d’une malédiction, s’en prend aux hommes et attaque le village d’Ashitaka, prince héritier du clan. Il sauve son village, mais il est touché et victime du même mal qui le ronge alors. Ashitaka est forcé de partir à la recherche du dieu Cerf pour lever la malédiction qui le ronge.
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Voilà une critique bien intéressante à lire ! Et d’autant plus intéressante qu’elle aborde le film en tant que tel, sans la différence de traitement qu’on trouve souvent dans les critiques envers les films d’animation. C’est rare, et c’est bien ! 🙂
Effectivement, Mononoke est, avec Nausicaä (le film, et encore plus le manga !), le film de Miyazaki au message le plus grave et mélancolique (en attendant Kaze Tachinu). Et avec une intensité telle, qu’il est difficile de ne pas ressentir soi-même, au moins en partie, la colère et la frustration des personnages face aux évènements. J’aime particulièrement ce qu’Ashitaka comprends progressivement, et essaie de transmettre aux autres : renoncer à la lutte demande parfois plus de force et de courage que de lutter.(attention, petit mic-mac dans l’intro : Titanic est sorti après Mononoke au Japon, et l’a dépassé au box-office historique. C’est le Voyage de Chihiro qui a finalement battu Titanic, en 2001)
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